• Les indicateurs trimestriels et les bilans semestriels sont
insuffisants pour constituer une image fidèle de la situation de
l’entreprise et de ses projets futurs. • «Il est fortement recommandé
d’opérer des achats et des ventes progressives, en petites mises, sur
un ensemble de valeurs sélectionnées, pour sauvegarder la valeur du
portefeuille et maximiser les gains», soutient un intermédiaire en
Bourse.
Il est 11h30, autour d’une grande table, trois hommes se
croisent les regards sans se parler. Quelques gestes, des clins d’œil
et des murmures, puis tout le monde focalise sur les écrans au fond de
la salle. Pourtant, ça fait des années qu’ils se côtoient à la salle du
marché, au siège de leur intermédiaire en Bourse, presque
quotidiennement. Ils sont à l’affut de tout mouvement des cours
boursiers, illustré par des triangles verts et rouges et des lignes
donnant des explications sur les offres d’achats et des ventes, en
quantité et en valeur. Plongés dans leurs réflexions, ils tentent
d’anticiper les tendances de la Bourse pour espérer réaliser des
plus-values sur la cession des titres ou acheter des actions à bon
marché.
Notre question portant sur les difficultés que rencontre un
petit porteur a animé les discussions et le débit des idées et des
propos prend de la vitesse. Puis, rapidement, les joueurs ont mandaté
l’un d’eux pour les représenter et s’exprimer en leur nom. En effet, ce
comportement est tout à fait compréhensible, puisque dans les assemblées
générales des entreprises, les petits porteurs sont représentés par
l’un d’entre eux. En conséquence, il reçoit des jetons de présence
s’élevant à près de quelques dizaines de mille dinars. Apparemment c’est
le rêve de tout petit porteur. M. Karim relève : «Le petit porteur est
constamment exposé aux risques du marché». Et d’expliquer : «Ils
paniquent, puis ils commencent à se débarrasser de leurs titres, ce qui
engendre l’effondrement des valeurs boursières et des portefeuilles». En
effet, démuni d’informations utiles et pertinentes, ces joueurs règlent
leurs comportements au rythme des gros investisseurs et aux tendances, à
court terme, du marché. «D’où les plus gros risques du délit d’initié»
note-t-il. Ce délit boursier est commis par des personnes qui vendent ou
achètent des valeurs mobilières en se basant sur des informations dont
ne disposent pas les autres. D’où l’utilisation ou la communication de
ces informations peuvent générer des gains illicites lors de
transactions boursières.
Le joueur pointe du doigt la complaisance entre
les gros investisseurs, les membres de certaines assemblées générales
et les intermédiaires en Bourse. Pour pallier cet écueil, il est
impératif de vulgariser l’information. «Les indicateurs trimestriels et
les bilans semestriels sont insuffisants pour constituer une image
fidèle de la situation de l’entreprise et de ses projets futurs»,
explique M. Khaled. Du même avis, les autres joueurs déplorent le manque
de communications financières des entreprises cotées. Pis, le problème
est plus prononcé pour les entreprises semi-étatiques ou la lourdeur
administrative entravant le rythme des communications. En redressant sa
casquette, avant de partir, il conclut : «Le petit porteur est
marginalisé». A cet égard, il est à noter que ces investisseurs ont
besoin d’informations sur les entreprises, de conseils des
intermédiaires en Bourse et d’une fourchette des prix d’achat et de
vente des titres. Autre obstacle est la commission de courtage
relativement chère pour les petits porteurs. Elle est de 4 à 8 pour
mille.
Plus de transparence et d’accessibilité
Un
peu plus loin, une rencontre one to one, entre le conseiller et l’un
des plus anciens joueurs, M. Mahmoud, le doyen, qui a commencé les
spéculations depuis son jeune âge. Accompagnant toutes les phases de
l’évolution de la place boursière, de la cotation sur les panneaux,
nominatives, à celle électronique, anonyme, en passant par
l’intermédiation des banques, il relève : «Le marché a gagné aussi bien
en transparence qu’en sécurité et offre plus d’accessibilité aux petits
porteurs». Mais, le doyen estime que les petits porteurs agissent,
encore, à «l’aveuglette» et en manque de visibilité. Son conseiller
intervient : «La délicatesse de notre métier réside dans la gestion du
patrimoine d’autrui». On conclut qu’il donnera les conseils nécessaires
en vue de réduire les risques et doper l’espérance de gains. En
revanche, à la suite d’un bref entretien téléphonique, il a placé sept
mille dinars en un seul titre.
La seule motivation est que ladite
société donnera une communication financière qui pourrait contenir des
indicateurs ou déclarations encourageantes susceptibles de créer une
tendance acheteuse des actions de la société, d’où une potentielle
hausse des cours et donc la réalisation de plus-value sur cession. A la
clôture de la séance, des applaudissements et des cris de joie se font
entendre à la salle de marché. Les mises sont porteuses. C’est un jour
de chance pour ces petits porteurs. A vrai dire, cela obéit aux règles
des jeux d’un casino plutôt qu’aux chapitres d’analyse des marchés de
capitaux ou ceux de la gestion de portefeuille.
Enfin, à en croire
les conseils des joueurs, le petit porteur ne doit pas miser tout son
budget, éviter de paniquer et être à l’affut de l’information. «Il est
fortement recommandé d’opérer des achats et des ventes progressives, en
petites mises, sur un ensemble de valeurs sélectionnées, pour
sauvegarder la valeur du portefeuille et maximiser les gains», explique
l’intermédiaire.
Source : la presse de tunisie
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